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Resident Evil 4 : le jeu qui n’aurait jamais dû exister



Sortie le 18 Mars 2005 , GameCube Sortie le 04 Novembre 2005 , PS2 Sortie le 08 Mars 2007 , Plus de tests sur PC
Publiée le 13/01/2015 à 17:01, par Maxence

Resident Evil 4 : le jeu qui n’aurait jamais dû exister

Pour les dix ans de Resident Evil 4, revenons sur son développement chaotique : de ses débuts en 1999 à sa sortie début 2005.

Resident Evil 4

Resident Evil 4 est un titre mythique à bien des égards. Il est l’épisode qui a bouleversé les habitudes de la célèbre série de Capcom, à une époque où le survival-horror classique – caméra fixe, contrôle rigide, focus sur les sensations plus que sur l’aspect ludique – plafonne niveau audience. Si aujourd’hui beaucoup de joueurs critiquent la prédominance de l’action pure dans les deux derniers épisodes chiffrés de la série, c’est clairement ce quatrième volet qui est l’instigateur du changement. Une nouvelle optique payante pour Capcom : Resident Evil 4 (toutes versions confondues), 5 et 6 sont les opus les plus vendus de la série, comptant pour près d’un tiers des 62 millions de RE vendus au fil des 21 épisodes et spin-off disponibles à ce jour.

Resident Devil
Mais Resident Evil 4 est également mythique pour le déroulé de son développement, et c’est ce qui va nous intéresser pour le dixième anniversaire de sa sortie. Disponible à partir de janvier (Japon) et mars (Europe) 2005, le titre de Shinji Mikami commence son chemin en 1999, alors même que Resident Evil Zero, un temps prévu sur Nintendo 64, voit son développement repris pour coller avec la puissance de la Gamecube, tout juste annoncée par Nintendo. Conformément à la logique de l’époque, seuls les titres destinés aux consoles Playstation sont pourvus d’un numéro : Resident Evil 4 doit sortir sur PS2, machine dont la sortie est calée en 2000.

Créateur de l’opus fondateur et producteur sur la série depuis le second volet, Shinji Mikami choisit alors Hideki Kamiya, son meilleur ennemi chez Capcom, pour élaborer les premiers concepts. Réputé pour son amour de l’action, Kamiya est derrière Resident Evil 2, qui est à l’époque le deuxième titre le plus vendu de Capcom après Street Fighter 2. Il souhaite poursuivre la mutation de la série en créant un jeu d’action stylisé, abandonnant les angles définis pour opter pour une caméra libre, plus adaptée aux mouvements aériens et au dynamisme du personnage principal. Les deux hommes s’accordent à penser que le concept s’éloigne trop de Resident Evil, mais dispose d’atouts suffisamment importants pour qu’un jeu à part soit créé. Le temps de convaincre (difficilement) les exécutifs de Capcom, et voilà que le background de cette première ébauche de Resident Evil 4 est entièrement retravaillé. Voilà le point de départ de Devil May Cry.

1er reboot et changement de console
Nous sommes alors fin 2000/début 2001, et pour la première fois, le développement de Resident Evil 4 repart de zéro ou presque. Hiroshi Shibata, derrière les somptueux décors pré-calculés de Resident Evil 3, reprend le flambeau et devient Director sur le projet. Malgré les gros problèmes éprouvés pour maitriser l’Emotion Engine de la PS2, le développement avance, si bien que le jeu est annoncé et montré lors d’un Tokyo Game Show, au printemps 2001 (à l’époque, il y avait un TGS tous les six mois). Cette Fog version, également appelée Castle par certains fans, n’est visible que sur quelques images tirées de publications japonaises (image ci-contre).

Les problèmes avec le développement sur Playstation 2 ont de plus en plus d'impact au sein de la structure. Les projets sont ambitieux, et trois développeurs de Devil May Cry décident d’abandonner le navire, faute de trouver des solutions viables pour faire tourner le jeu sur la console. Peu de détails ont filtré sur cette époque, mais la réaction de Capcom se veut cinglante : sans doute sous l’impulsion de Mikami, très puissant à l’époque, l’éditeur annonce fin 2002 un partenariat au long court qui fera couler beaucoup d’encre. Pas moins de cinq jeux de l’éditeur sont prévus en exclusivité sur Gamecube. Les fameux Capcom Five sont P.N.03, Resident Evil 4, Viewtiful Joe, Killer 7 et un certain Dead Phoenix, finalement annulé. La piste Xbox fut rapidement annulée, après un rendez-vous visiblement assez glacial entre la marque américaine et Shinji Mikami, aux alentours de Noël en 2000. Pour Capcom, Microsoft manque alors d’une vision claire de ce qu’est le jeu vidéo. C’est ce qui, d’après la firme d’Osaka, conduira inévitablement la firme américaine à un échec cuisant, au moins sur le sol japonais. Good guess.

Resident Evil 3.5, attention les sphincters
Les développeurs du Capcom Production Studio 4, fondé au sein de l’éditeur en 1999 pour Dino Crisis et en charge de la plupart de ces exclusivités, sont assez mitigés à cette annonce. S’il est certain que la Playstation 2 pose problème, c’est aussi la console qui se vend le mieux à ce moment-là (fin 2002, début 2003), et avec ce partenariat exclusif, l’équipe voit s’éloigner la perspective de juteux bonus, alors déjà indexés sur les chiffres de vente. En tant que Producer, Mikami tient bon, visiblement agacé par le comportement de Sony qui tarde à aider les développeurs tiers. Il aurait même déclaré, à une publication japonaise, qu’il se ferait harakiri si le jeu sortait sur Playstation 2. Shibata se décide à montrer le jeu l’année suivante : ce sera la fameuse vidéo de la version Hook Man (aussi appelée Hallucination), projetée lors de l’E3 2003 et disponible dans un DVD bonus offert au Japon avec la sortie finale du jeu, en 2005. C’est à l’occasion de sa diffusion que Mikami aura cette formule, restée célèbre depuis : « Don’t pee your pants » (« ne vous faites pas pipi dessus ») affirme-t-il, plein de confiance, au moment de projeter le trailer lors de l’évènement.

Resident Evil 4, en 2003


Le cadre est différent de la version de 2001, et on sent les prémisses d’un changement majeur pour la série : cette version mélange plans de caméra classiques, définis à l’avance, et visée épaule. C’est toujours Le héros du second volet, Leon S. Kennedy, qui est en proie à une mystérieuse infection. Touché à la main dans la version Fog (ce qui était censé lui donner de nouveaux pouvoirs), c’est ici dans son intégralité qu’il est contaminé par un mystérieux virus, différents des précédents. Victime d’hallucinations, il croise des soldats fantomatiques en armure, des poupées animées et un nemesis visiblement immortel – le fameux Hook Man – qui se transforme en une myriade de particules une fois mis à mal. Le corps à corps s’effectue par action contextuelle, une autre feature conservée dans la version finale, et il se dit même à l’époque que l’on pourra effectuer différents choix de dialogue, ce qui aurait été une première dans la série. Le jeu est absolument magnifique, au niveau des lumières comme des modèles 3D, et conquiert immédiatement la presse grâce à son impressionnante réalisation.

« Définitivement, non. Définitivement, non. Resident Evil 4 est une exclusivité Gamecube » Hiroyuki Kobayashi, mars 2004.
C’est peut-être ce challenge technique qui pousse Capcom et Mikami à faire de nouveau machine arrière. Officiellement, c’est parce que cette version reste dans le même moule général que les précédents Resident Evil, alors que Mikami souhaite clairement « réinventer la licence », et donc s'affranchir de ses habitudes. Une quatrième version du jeu est donc mise en chantier. Jamais montrée en public, elle fait revenir les zombies habituels mais peine à convaincre en interne. Le tout manque d’originalité et de mordant, et apparaît comme stéréotypé aux yeux de Capcom. Shinji Mikami reprend alors, très rapidement, les rênes du projet, avec une seule idée en tête : c’en est fini des zombies. Nous sommes fin 2003, quatre ans se sont écoulés et quatre versions du jeu ont déjà été développées puis abandonnées. Le projet commence à sentir le roussi, et Capcom met la pression pour que le titre sorte rapidement, tout en conservant de hautes exigences commerciales.

Shinji Mikami l’expliquera plus tard : ce qui l’a poussé à faire pencher la licence du côté de l’action, ce sont les mauvais résultats de l’épisode Rebirth, remake Gamecube du premier Resident Evil sorti entre-temps. Les 1,35 millions d’unités écoulées ne satisfont pas Capcom, qui exige mieux pour le quatrième épisode. Mikami ne le sait pas encore, mais Capcom revient sur ses promesses, et annonce une version Playstation 2 de Resident Evil 4 avant même la sortie de la version Gamecube. C’est une véritable trahison pour Shinji Mikami et Hiroyuki Kobayashi (passé Producer), qui assuraient à qui voulait l’entendre que jamais leur titre ne sortirait sur d’autres supports. C’est le début de la fin de la collaboration de Mikami avec Capcom, entamée en 1990 (Aladdin et Goof Troop sur SNes, c’est lui) et achevée en 2007 par la fermeture de Clover Studio, structure all star créée par Capcom pour des titres aussi marquants (God Hand, Okami) que non rentables.

Resident Evil 4, l'heureux accident
Après tant d’aléas, le développement de Resident Evil 4 semble enfin se passer sans accrocs. On apprendra l’origine de la fameuse visée épaule, qui inspirera tous les Third Person Shooters qui sortiront par la suite : c’est en débriefant sur Onimusha 3, que Mikami supervise – il est toujours l’homme fort de Capcom à l’époque –, que le créateur se rend compte de ce qui ne fonctionne pas. Très (mais alors très) tourné vers l’action, le survival féodal mettant en scène Jean Réno (!?) s’avère cruellement engoncé dans son système de caméra fixe, poussant ses développeurs à imaginer un nouveau mode de visée pour un éventuel prochain titre : ainsi vient l’idée de la vue épaule, forcément plus pratique pour viser et réellement imaginable dans un environnement en complète 3D. « Peut-être que si Onimusha 3 avait été meilleur, je n’aurais pas pensé à Resident Evil 4 » ironisera d’ailleurs Mikami des années plus tard.

RE 4 enfin en mouvement

Le premier trailer de Resident Evil 4, sous sa dernière forme


Entre la reprise du développement de RE 4 par Mikami et sa sortie en janvier 2005 au Japon, il s’écoule moins de deux ans. Un temps somme toute raisonnable pour construire ce qui deviendra l’immense succès critique, puis commercial, que l’on connait. Toutes versions confondues, Resident Evil 4 s’écoule effectivement à plus de sept millions d’unités. Reniée par Mikami, la version PS2 reste à ce jour la plus vendue, à 2,3 millions d’exemplaires environ. C’est elle qui permet à RE4 d’être le succès tant souhaité par Capcom, puisque sur Gamecube, le jeu ne vend « que » 1,6 millions d’unités. C’est même moins que la mouture Wii, sortie trois ans plus tard et écoulée à 1,9 millions.

Conclusion
Les mauvais résultats de Rebirth, les défauts d’Onimusha 3, la lassitude des zombies, la trop grande ambition de certaines versions, la pugnacité de Mikami, le changement de plateforme : qu’ils aient aidé ou non à faire de Resident Evil 4, le monument du jeu vidéo qu’il est indéniablement aujourd’hui, les incidents se sont multipliés lors du développement, de 1999 à 2005. Difficile d’imaginer un tel parcours pour un jeu à gros budget aujourd’hui : la minimisation des coûts et des risques, additionné aux obligatoires focus groupes et autres sondages d’opinion forcent désormais les éditeurs à limiter les expérimentations et à coller au maximum avec les attentes des joueurs. La qualité des jeux augmente donc (en théorie), au détriment de l’originalité, cantonnée aux productions indépendantes moins fortunées.

Sans Mikami, Capcom a poursuivi la voie tracée par son emblématique développeur, sortant ensuite Resident Evil 5 (en 2009, après un développement également compliqué de près de quatre ans) et Resident Evil 6. Deux énormes succès commerciaux largement – et quasiment unanimement – critiqués par les fans de la première heure, qui n’y voient que de simples jeux d’action écervelée. La recette est presque la même – visée épaule, nombreux affrontements – mais il manque clairement quelque chose à chacun de ces deux titres, en tout cas lorsque l’on connait le riche historique de la licence. C’est peut-être ça, la patte Shinji Mikami, parti fonder Tango Gameworks, studio depuis racheté par Bethesda. On lui doit récemment le très réussi The Evil Within, sorti en fin d’année dernière. Ce dernier regorge d’ailleurs de clins d’œil et références à la licence de Capcom, comme un pied de nez du taciturne créateur (on le dit dans le milieu, avec Mikami c’est quitte ou double en interview) à son ancien employeur.

Tous les commentaires

  • shenron666
    15/01/2015 12:02:10

    dream-voice comme ton com' :D

  • CoT_Banshee
    15/01/2015 10:10:59

    patrice23 Pour moi Rebirth et Code Veronica, le 0 est cool mais l'histoire m'a moins marqué.

  • dream-voice
    14/01/2015 22:19:16

    "le jeu qui n?aurait jamais dû exister" et il aurait mieux fait ...

  • Turel
    14/01/2015 19:24:47

    Philiiiippe!!! Dr.SATAN gamer-du38 Turel unity-G J'aurais préfèrè un jeu plus soigné, car pour moi c'est plus immersif.  La, c'était textures dégeulasses + graphismes très moyen + gameplay raté = Jeu assez moyen.  Pas mauvais, mais très moyen. Surtout quand on connait l'expérience du mec, mais il à préféré rester coincer dans sa bulle temporelle????

  • daerlnaxe
    14/01/2015 19:24:35

    BiZou Angel Heart Même avis que Bizou, le premier EST le meilleur. Il reprenait Alone in the dark en introduisant un plus sans trop perdre de la réflexion

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