Test de Myst
Myst est un vénérable ancêtre, sorti en 1994 sur PC. A l’époque, le titre inaugure ce qui deviendra une grande série du jeu d’énigme point & click, entre casse-tête démoniaque et expérience dépaysante exceptionnelle. En 2007, Midway décide de toiletter ce respecté fossile et nous gratifie d’une adaptation DS, promettant une exploitation optimum des possibilités offertes par la portable de Nintendo, un Age « bonus » à explorer et de nouveaux effets sonores et visuels. Le vernis étalé à la hâte va pourtant bien vite s’écailler... Le néophyte auquel l’univers de Myst est totalement inconnu pourra se reporter à notre test de la version PC afin de comprendre pourquoi ce soft a pu magnétiser des générations de joueurs. En effet, la présente critique va surtout mettre en lumière les caractéristiques de la version DS et risque d’écorner un soft, qui en lui-même, reste tout à fait attractif.
Myst est un point & click. La progression se fait donc par écrans successifs. Les graphismes ont affreusement vieilli. Si vous ne connaissez pas la série ou avez commencé à partir de Riven, vous risquez d’avoir un choc. Techniquement, voilà qui ne fait pas honneur aux possibilités actuelles vidéoludiques. Vous êtes prévenus. Myst sur ce plan aussi est un jeu exigeant : il va vous demander de faire un effort d’imagination pour remplir tout ce que vous ne verrez jamais. C’est donc la fantaisie du joueur qui nourrit et magnifie le rythme lent du soft, reposant sur des événements minuscules. Il s’agit paradoxalement d’un des intérêts premiers du jeu. Myst réalise avec celui qui l’expérimente une alchimie toute personnelle.
Les louanges s’arrêteront là. Ce qui était vrai pour la version PC se ratatine ici à quelques centimètres de la DS. L’écran supérieur est sous-exploité. On écarquille les yeux sur le logo du jeu (!), sur une carte inutile, une machine à écrire pour taper des notes (mais sur 9 lignes, pas plus !) ou sur une loupe grotesque qui se contente de grossir en une bouillie de pixels immonde les décors rabougris. On oublie illico et on baisse vite les yeux sur l’écran du bas. Pour un jeu qui repose sur une observation scrupuleuse des décors et la manipulation d’objets au pixel près, il est problématique de devoir se débrouiller avec un écran si petit. Pour ne rien arranger, un menu inamovible en ronge une partie ! On cherche encore les fameuses améliorations graphiques promises par Midway ! S’agirait-il de ces pixels désalignés lors des sur-impressions vidéos ? Les dents grincent...
La grogne monte quand s’invitent les bugs. Outre les petits problèmes, comme des passages non traduits et lisibles / audibles en allemand ou en anglais, on peut être victime de véritables crash. On ne saurait que trop vous conseiller de démultiplier les sauvegardes afin de ne pas pulvériser la DS contre un mur, quand, par exemple au terme d’une longue et laborieuse manipulation, vous vous retrouverez dans l’incapacité de quitter le tableau... Pire, la DS peut geler à des moments critiques. Il se trouve que ma console a freezé deux fois de suite après la redoutable énigme du piano ou à la toute fin, lors d’une « cinématique. »
Enfin, on peut s’interroger sur le hiatus étrange d’une adaptation de Myst sur portable : il est vivement conseillé de jouer à Myst chez soi ou au calme avec de quoi noter et dessiner (voire enregistrer !) sous la main. Oubliez l’idée de jouer dans les transports par exemple. Pour dénouer les fils des nombreuses énigmes et ne pas rester misérablement bloqué sur l’île de départ, il va falloir faire preuve d’une patience et d’une persévérance incompatibles avec la poignée de minutes accordées au jeu sur portable entre deux arrêts de bus.
Cette version propose néanmoins un niveau bonus : l’Age de Rime, mais aussi attractif que soit ce monde glacé, il est trop bref pour justifier en lui-même l’achat. Catapulté en fin de partie, sans un mot d’introduction, c’est un (très petit) clin d’œil aux épisodes qui suivront.
Myst est désormais disponible à moins de 5 euros sur PC. Il est vrai que faire tourner ce jeu optimisé pour Windows 95 sur nos systèmes d’exploitation récents sera la première (et douloureuse) énigme à résoudre, mais cela vous épargnera sans doute la sensation d’avoir reçu à la figure un bon gros crachat de Midway.