Singularity, un BioShock en moins bien
Raven Software, l’illustre développeur de Soldier Of Fortune et autres Heretic, bossait sur trois projets ambitieux en même temps. Le réussi Wolverine, le décevant Wolfenstein et l’énigmatique Singularity, dont on n’a plus entendu parler ou presque depuis quelques mois déjà. Sorti en toute discrétion, ce FPS aux allures de BioShock du pauvre s’est enfin livré à nos petits doigts tout pleins d’à priori. Alors, c’est si nul que ça ?
En 1955, des scientifiques russes mènent d’étranges expériences (comme tous les russes de l’époque, il faut croire) sur Katorga 12, une île paumée au large du Kamtchatka. La découverte d’un nouvel élément chimique, l’E99, leur permet en effet d’espérer mater ces « chiens de capitalistes » pour faire régner la Mère Russie sur le globe. Forcément, la puissance de l’E99 échappe complètement aux spécialistes et la catastrophe (mettant en cause le générateur d'E99, nommé Singularity) est aussi dévastatrice qu’étouffée par le gouvernement. En 2010, de bons GI américains viennent à Katorga pour enquêter. Nathanael Renko voit l’hélicoptère qui le transportait jusqu’à l’ex-labo russe s’écraser mystérieusement et le séparer du reste de son unité. Maintenant, il va falloir comprendre.
Rapidement en possession du Manipulateur Temporel (MT), un dispositif permettant d’influer sur le rapport au temps des objets et êtres humains marqués à l’E99 comme de passer d'une période à l'autre à quelques endroits précis, Renko se retrouve plongé dans une sombre histoire de paradoxe temporel (à la manière du futur de Biff dans Retour vers le Futur 2) qu’il va tenter de déjouer par tous les moyens. Fortement calqué sur BioShock, la classe art-déco en moins, Singularity met un certain temps à nous faire oublier la sensation de déjà-vu qui nous assaille lors des premières minutes de jeu. Le MT remplace les plasmides et s’utilise de front avec des armes à feu, certaines étant classiques (pistolet, pompe, mitrailleuse auto, sniper) et d’autres nettement moins (utilisant l’énergie de l’E99, pour un résultat détonant).
On s’aperçoit vite que les affrontements armés sont bien loin d’être excitants, la faute à des impacts timorés et à des sensations de tirs quasi-inexistantes (reste le snipe en mode ralenti, toujours aussi jouissif), nous forçant à nous tourner exclusivement vers le MT pour ressentir un peu d’excitation. Ce dernier servira, vous vous en doutiez sans doute, pour les énigmes (enfin, les chtits puzzles quoi) comme les combats, contre un bestiaire suffisamment diversifié pour correctement varier les plaisirs. Blast au corps à corps, vieillissement de la cible et divers pièges contextuels (l'ennemi est sur un pont, paf je vieillis le pont qui devient tout cassé, paf le vilain tombe par terre) sont malheureusement bien seuls, assez rare pour ces derniers qui plus est, pour que l'on ait l'impression de profiter de l'environnement plutôt que de le subir.
Raven a vraisemblablement décidé de contrôler ses environnements de près, empêchant le joueur d'avoir une quelconque liberté d'action en leur sein. À peine peut-on décider d'utiliser quelques bidons d'essence qui trainent ça et là pour se débarrasser des créatures, bien plus coriaces que leurs homologues humains. Le MT, qui peut également servir de gravity gun à la Half-Life 2, ne jouit pas non plus de suffisamment d'interactions possibles avec les décors, certes détaillés, mais trop peu fournis quand il s'agit de faire la bagarre. Bref, on a le sentiment d'avoir un bien beau jouet, mais pas de place ou d'occasion pour l'utiliser.
Un tas de possibilités, mais trop peu d'occasions de les utiliser...
Ce level design contraignant se traduit qui plus est par une linéarité implacable, Raven n'ayant visiblement pas le talent d'Irrational Games pour ouvrir un petit peu son monde. Le travail reste sérieux, comme au niveau de la jouabilité d'ailleurs toujours impeccable malgré le grand nombre de fonctionnalités du MT. En bon élève, le développeur du Wisconsin a également pris le soin d'intégrer quelques saynètes venant varier le classique scénario / énigme / action qui dicte le rythme du jeu. On apprécie ainsi la séquence d'infiltration dans les égouts ou le gigantesque boss du pont, qui, avec quelques autres passages orientés ambiance ou action, viennent nous tirer de la torpeur dans laquelle le cœur du jeu nous plonge inéluctablement.
Singularity n'est pourtant pas mauvais. Son manque de surprise associé à une réalisation très banale établissent un rythme trop mécanique pour être honnête. Le héros muet qui obéit comme un benêt aux ordres qu'on lui donne, les environnements du port, des laboratoires, de l'école et des égouts vus et revus, des aller-retour entre deux périodes différentes trop rares et assez mal utilisés nous rappellent sans cesse que l'élève est bien loin de dépasser le maître. Malgré tout, l'ambiance parvient à fonctionner grâce à quelques choix artistiques judicieux, une mise en scène volontaire et des bruitages convaincants à défaut d'être bouleversants. Une fois encore, le volontarisme de Raven se heurte à une réalisation très bof. Le « cul entre deux chaises », Singularity parvient à sauver les meubles grâce à une fluidité jamais prise en défaut et quelques effets lumineux sympathiques, nous permettant de tolérer l'aliasing général et la simplicité des textures.
Pas aussi immersif qu'un BioShock, jamais aussi jouissif qu'un Half-Life 2, Singularity ne se distingue pas vraiment de ses modèles et c'est bien là le problème. Passées les sept petites heures de jeu du solo, on pourra à la rigueur se reporter sur les deux modes multijoueur dont le plus intéressant se rapproche du versus de Left 4 Dead, échouant ici encore à nous faire ressentir les mêmes sensations. Un gadget sur lequel on passera éventuellement quelques minutes (si d'autres joueurs daignent se joindre à nous !), mais qui ne fera clairement pas date. Le titre de Raven nous laissera au final toujours un peu la même impression : celle d'un FPS ultra classique, limite ennuyeux pour qui tâte du genre depuis longtemps, mais qui pourra faire passer quelque bon moment aux joueurs fortunés n'ayant pas la chance de partir en vacances.
Inférieur en tout point aux modèles dont il s'inspire grandement, Singularity est un FPS trop lisse pour intéresser les vieux de la vieille. Son gameplay trop radin, malgré quelques bonnes idées et le manque de prise de risque général nous donne un bon petit produit bien ficelé et valable dans l'absolu, mais trop académique et prévisible pour attirer notre attention. Typiquement le type de jeu à acquérir d'occasion, Singularity est au final au niveau auquel on l'attendait : moyen.
Salauds de Russes !
En 1955, des scientifiques russes mènent d’étranges expériences (comme tous les russes de l’époque, il faut croire) sur Katorga 12, une île paumée au large du Kamtchatka. La découverte d’un nouvel élément chimique, l’E99, leur permet en effet d’espérer mater ces « chiens de capitalistes » pour faire régner la Mère Russie sur le globe. Forcément, la puissance de l’E99 échappe complètement aux spécialistes et la catastrophe (mettant en cause le générateur d'E99, nommé Singularity) est aussi dévastatrice qu’étouffée par le gouvernement. En 2010, de bons GI américains viennent à Katorga pour enquêter. Nathanael Renko voit l’hélicoptère qui le transportait jusqu’à l’ex-labo russe s’écraser mystérieusement et le séparer du reste de son unité. Maintenant, il va falloir comprendre.
Vidéo-Test de Singularity
Singularity : Vidéo-Test de Singularity
Rapidement en possession du Manipulateur Temporel (MT), un dispositif permettant d’influer sur le rapport au temps des objets et êtres humains marqués à l’E99 comme de passer d'une période à l'autre à quelques endroits précis, Renko se retrouve plongé dans une sombre histoire de paradoxe temporel (à la manière du futur de Biff dans Retour vers le Futur 2) qu’il va tenter de déjouer par tous les moyens. Fortement calqué sur BioShock, la classe art-déco en moins, Singularity met un certain temps à nous faire oublier la sensation de déjà-vu qui nous assaille lors des premières minutes de jeu. Le MT remplace les plasmides et s’utilise de front avec des armes à feu, certaines étant classiques (pistolet, pompe, mitrailleuse auto, sniper) et d’autres nettement moins (utilisant l’énergie de l’E99, pour un résultat détonant).
Un cruel manque de sensations
On s’aperçoit vite que les affrontements armés sont bien loin d’être excitants, la faute à des impacts timorés et à des sensations de tirs quasi-inexistantes (reste le snipe en mode ralenti, toujours aussi jouissif), nous forçant à nous tourner exclusivement vers le MT pour ressentir un peu d’excitation. Ce dernier servira, vous vous en doutiez sans doute, pour les énigmes (enfin, les chtits puzzles quoi) comme les combats, contre un bestiaire suffisamment diversifié pour correctement varier les plaisirs. Blast au corps à corps, vieillissement de la cible et divers pièges contextuels (l'ennemi est sur un pont, paf je vieillis le pont qui devient tout cassé, paf le vilain tombe par terre) sont malheureusement bien seuls, assez rare pour ces derniers qui plus est, pour que l'on ait l'impression de profiter de l'environnement plutôt que de le subir.
Raven a vraisemblablement décidé de contrôler ses environnements de près, empêchant le joueur d'avoir une quelconque liberté d'action en leur sein. À peine peut-on décider d'utiliser quelques bidons d'essence qui trainent ça et là pour se débarrasser des créatures, bien plus coriaces que leurs homologues humains. Le MT, qui peut également servir de gravity gun à la Half-Life 2, ne jouit pas non plus de suffisamment d'interactions possibles avec les décors, certes détaillés, mais trop peu fournis quand il s'agit de faire la bagarre. Bref, on a le sentiment d'avoir un bien beau jouet, mais pas de place ou d'occasion pour l'utiliser.
Ce level design contraignant se traduit qui plus est par une linéarité implacable, Raven n'ayant visiblement pas le talent d'Irrational Games pour ouvrir un petit peu son monde. Le travail reste sérieux, comme au niveau de la jouabilité d'ailleurs toujours impeccable malgré le grand nombre de fonctionnalités du MT. En bon élève, le développeur du Wisconsin a également pris le soin d'intégrer quelques saynètes venant varier le classique scénario / énigme / action qui dicte le rythme du jeu. On apprécie ainsi la séquence d'infiltration dans les égouts ou le gigantesque boss du pont, qui, avec quelques autres passages orientés ambiance ou action, viennent nous tirer de la torpeur dans laquelle le cœur du jeu nous plonge inéluctablement.
« Une réalisation trop banale »
Singularity n'est pourtant pas mauvais. Son manque de surprise associé à une réalisation très banale établissent un rythme trop mécanique pour être honnête. Le héros muet qui obéit comme un benêt aux ordres qu'on lui donne, les environnements du port, des laboratoires, de l'école et des égouts vus et revus, des aller-retour entre deux périodes différentes trop rares et assez mal utilisés nous rappellent sans cesse que l'élève est bien loin de dépasser le maître. Malgré tout, l'ambiance parvient à fonctionner grâce à quelques choix artistiques judicieux, une mise en scène volontaire et des bruitages convaincants à défaut d'être bouleversants. Une fois encore, le volontarisme de Raven se heurte à une réalisation très bof. Le « cul entre deux chaises », Singularity parvient à sauver les meubles grâce à une fluidité jamais prise en défaut et quelques effets lumineux sympathiques, nous permettant de tolérer l'aliasing général et la simplicité des textures.
Pas aussi immersif qu'un BioShock, jamais aussi jouissif qu'un Half-Life 2, Singularity ne se distingue pas vraiment de ses modèles et c'est bien là le problème. Passées les sept petites heures de jeu du solo, on pourra à la rigueur se reporter sur les deux modes multijoueur dont le plus intéressant se rapproche du versus de Left 4 Dead, échouant ici encore à nous faire ressentir les mêmes sensations. Un gadget sur lequel on passera éventuellement quelques minutes (si d'autres joueurs daignent se joindre à nous !), mais qui ne fera clairement pas date. Le titre de Raven nous laissera au final toujours un peu la même impression : celle d'un FPS ultra classique, limite ennuyeux pour qui tâte du genre depuis longtemps, mais qui pourra faire passer quelque bon moment aux joueurs fortunés n'ayant pas la chance de partir en vacances.
Conclusion
Inférieur en tout point aux modèles dont il s'inspire grandement, Singularity est un FPS trop lisse pour intéresser les vieux de la vieille. Son gameplay trop radin, malgré quelques bonnes idées et le manque de prise de risque général nous donne un bon petit produit bien ficelé et valable dans l'absolu, mais trop académique et prévisible pour attirer notre attention. Typiquement le type de jeu à acquérir d'occasion, Singularity est au final au niveau auquel on l'attendait : moyen.
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